Ceci est une ébauche d’article, le but est de déblayer le terrain en vue d’obtenir une base théorique solide.

Certains se demandent : « le jeu de rôle est-il un art ? »
Je répondrai que la question est mal posée, ce à quoi nous pouvons réfléchir, c’est : « peut-on faire de l’art avec le jeu de rôle ? »

Définir en quoi l’art et le jeu de rôle peuvent coexister est pour moi une ligne de travail, un champ de recherche et de questionnement et non la volonté de prouver quoi que ce soit, ni d’ériger le jeu de rôle à un rang culturel.
Certains s’y sont essayés avant moi et je dois dire que rien dans les articles de Mike Pohjola ni de Rotwang Knievel ne m’a paru creuser la question dans la direction qui lui convient, à savoir en regard de l’évolution au fil des siècles de la définition de l’art.

1- L’art au delà de la vision réductrice du médium
1.1- De quoi parlons-nous ?
– L’art est indissociable du monde sensible ; comprendre : ce qui nous est perceptible, ce que l’on peut appréhender par nos sens.
– L’art est une qualité immanente d’une production, d’un acte.
– L’art n’existe pas en dehors de la perception d’un public comme le proclame la fameuse phrase de Marcel Duchamp : « C’est le regardeur qui fait le tableau ».
– L’art est un questionnement produit dans une dimension formelle.
– Ainsi, je résumerai ces quatre points en une définition : L’art est la perception d’une problématique formelle produite dans le monde sensible.

On juge la qualité d’une oeuvre d’art par la cohérence de la proposition et de la démarche de l’artiste en tant qu’elles transparaissent de l’oeuvre, ainsi que dans l’authenticité et la pertinence de sa mise en oeuvre.
L’activité artistique est un processus créatif de manifestation de la perception humaine par un intermédiaire : un médium, qu’il soit sonore, pictural, narratif ou d’une autre nature. Paul Klee disait : « rendre visible l’invisible. »
Elle est l’expression d’un point de vue.

1.2- L’art en tant qu’activité humaine
L’activité artistique est dite autonome par opposition à l’hétéronomie de la plupart des activités humaines, ce qui signifie que l’art n’a de but qu’en lui-même.
Fabriquer une voiture pour gagner de l’argent est une activité hétéronome, de même que produire une vidéo pour vanter les mérites d’un shampooing.
Les demoiselles d’Avignon de Pablo Picasso questionne les canons de la peinture du début du XXème siècle, c’est une production autonome.
Bien entendu, un artiste peut gagner de l’argent par sa pratique, mais la valeur de l’art est indépendante du coût de fabrication d’une oeuvre ou de son temps d’exécution. La valeur monétaire est un reflet de la valeur esthétique jugée par l’acquéreur.
Considérez bien que ces notions d’autonomie/hétéronomie se situent dans le champ « industriel » (qui relève de l’activité humaine) et non psychologique.
La différence entre autonomie et hétéronomie s’applique à la distinction entre l’art et l’art appliqué, ce dernier étant une démarche créative appliquée à une nécessité qui lui est étrangère (design automobile, publicité etc.).

1.3- Le jeu dans l’art
Le rapprochement entre art et jeu est plus que probant depuis les années soixante, avec des mouvements comme Fluxus, pour qui le processus de production artistique prévaut sur l’oeuvre figée. L’art s’insère dans le champ du « jeu avec le réel », dans les espaces inoccupés de l’activité humaine hétéronome, autrement dit, dans le « jeu » des rouages de la société. La plupart des actions et performances d’artistes comme celles de Joseph Beuys ou de Marina Abramovic relèvent d’un jeu qui produit du sens dans le contexte de sa mise en oeuvre.

2- L’activité ludique entre-t-elle dans le champ de l’autonomie ?
Le jeu, possède trois fonctionnalités reconnues : il permet d’apprendre, de se divertir et de sociabiliser.
Pour faire glisser ce champ d’activité dans celui de l’art, il faudrait le dépouiller de ses fonctionnalités pour le rendre autonome.
Tout jeu n’est pas nécessairement éducatif, bien que comme toute expérience, il produit une assimilation d’informations. Le tout est de ne pas rendre ce phénomène prioritaire.
De même pour l’aspect social du jeu, qui, bien que primordial ne me semble pas entraver son autonomie s’il n’est pas le but premier des participants.
Concernant le divertissement, cela pose davantage de problèmes, nous allons le voir.

2.1- Comment un jeu peut-il ne pas être divertissant ?
Cela n’est rendu possible que par deux moyens :
2.1.1- La richesse sémantique du mot « jeu », qui, comme nous l’avons déjà évoqué, peut signifier une activité de relative gratuité, comme une parenthèse avec le monde, un rapport aux choses, une mise à l’épreuve pouvant mener à des activités créatives telles que « jouer d’un instrument » (en anglais : « to play »), un espace indésirable entre les pièces d’une mécanique, une activité soumise à des règles acceptées par consensus (en anglais : « game ») etc.
Selon Roger Caillois, le jeu reflète la structure de l’ensemble des activités humaines, mais se crée dans une parenthèse où l’erreur, l’expérimentation et l’échec sont permis car leurs conséquences sont relatives. Ici se trouve un espace de production artistique par référence, car le jeu permet d’éprouver le monde.
2.1.2- L’apparition de jeux fictionnels et narratifs : le jeu de rôle et les jeux vidéo. En associant des structures ludiques à la production ou à l’exploration de fictions narratives, le jeu s’ouvre de nouvelles portes lui permettant de quitter le champ du ludique en intégrant de nouvelles potentialités.
Bien entendu, ce type de jeu existe depuis bien plus longtemps que Donjons & Dragons (Dave Arneson et Gary Gygax) : les surréalistes et le groupe DADA pratiquaient toutes sortes d’activités créatives et ludiques à dessein artistique, cependant la forme actuelle du jeu de rôle est définissable comme médium à part entière, ce qui n’est pas le cas de ses ancêtres.
2.2 – L’art et le divertissement peuvent-ils coexister dans une même oeuvre ?
2.2.1- L’étymologie du mot « divertissement » nous éclaire sur l’un des aspects fondamentaux des activités que l’acception englobe : Du latin divertere : détourner.
L’homme qui se divertit est l’homme qui fuit ses préoccupations existentielles et métaphysiques, qui cherche à se soustraire à sa misère quotidienne. Alors que l’art propose un questionnement, une problématique qui s’ancre dans le réel, le divertissement nous en détourne. Le spectacle de divertissement est la vitrine du système dominant (cf. Guy Debord, La société du spectacle).
Le spectaculaire, c’est une scène d’action de cinéma, des effets pyrotechniques, des effets sonores, des trucages bluffants. C’est le développement extrême du métier d’illusionniste.
« (L’artiste) s’il n’est pas dramaturge, il est publiciste. Le thaumaturge, c’est le publicitaire. » (Paul Virilio, Catherine Ikam, Louis Fléri, Portraits réel/virtuel (1999) Paris Audiovisuel, Maison Européenne de la photographie (Exposition présentée à la Maison Européenne de la photographie du 24 février au 30 mai 1999.p.11)
Car l’image devient fascinante, quand, inféodée à la technique elle se purge de tout sens, de toute aspérité pour confiner à une perfection lisse et ostensible dans le but d’émerveiller et d’impressionner.
Le spectaculaire est le feu d’artifice qui capte notre regard, nos pensées et les détourne de ce qui fait sens.
De par l’outil spectaculaire, le divertissement remplit son rôle et vide une oeuvre de ses problématiques potentielles, mais ce faisant, elle se soumet à l’idéologie dominante : la neutralité sémantique d’une oeuvre est aussitôt convertie en une apologie de son système de production du fait qu’elle a été produite par et pour lui.
2.2.2- Notons que dans un médium narratif comme la littérature, le cinéma ou le jeu de rôle, la distinction art/divertissement devient complexe, car problématique et spectacle peuvent s’alterner dans la durée.
Quelles sont les conséquences de la jonction au sein d’une même oeuvre du spectacle et d’une problématique ?
En premier lieu, nous observons que les moments de questionnement et de divertissement sont séparés.
2.2.3- Comparons : Matrix d’Andy et Larry Wachovski et Mulholland Drive de David Lynch.
D’une certaine façon, ces deux oeuvres cinématographiques possèdent des phases de questionnement et des phases plus distrayantes, où la narration sert une intrigue qui semble n’avoir d’autre but qu’elle même, sans problématique avérée. Nous découvrons ici une première différence : Matrix propose des scènes d’action pures et dures pouvant s’étirer considérablement dans la durée, voire constituer une partie plutôt conséquente de la totalité de la trilogie. Une intrigue est tissée sur les trois films. Par moment, les personnages abordent des questions métaphysiques en discutant ou en se confrontant à la métaphysique du monde présenté.
Mulholland Drive s’installe dans une intrigue plutôt classique, qui nous implique, mais qui se trouve soutenue par une impression de bizarrerie et par des scènes parfois crues. Cette partie du film en constitue la plus grande portion. De nombreuses questions sont posées dans l’histoire, mais la fin du film brouille les pistes, les identités semblent changées dans un imbroglio aux relents psychologiques ou existentiels.
Dans le premier film, des questions métaphysiques sont clairement posées, notamment : « la réalité est-elle bien ce que l’on croit ? » On pourrait donc déjà en extraire une problématique centrale.
Dans le deuxième, c’est la question de notre rapport au film, à l’intrigue et à notre part d’interprétation qui est prédominante. David Lynch nous laisse une grande part à l’interprétation de son oeuvre, qu’il ne veut surtout pas expliquer. Et c’est là que Mulholland drive se différencie de Matrix : l’oeuvre ne signifie pas, elle n’est pas un vecteur de communication d’une idée ou d’un questionnement, mais elle contient en elle, dans sa forme, du sens. C’est le principe de l’immanence.
2.2.4- Matrix ne nous demande pas d’aller chercher le questionnement mais nous le sert sur un plateau, au milieu de pâtisseries sucrées qui sont les scènes de pur divertissement dont la problématique disparaît au profit du spectacle. Qui a pensé en voyant les scènes d’action divertissantes de Matrix : « Mais c’est bien sûr ! C’est le spectacle qui constitue la matrice, qui nous empêche de voir la réalité et de se questionner sur elle. Arrêtons cette fuite schizoïde devant les productions de divertissement pour appréhender la vie et en faire ce que nous voulons vraiment qu’elle soit. » ?
Mulholland drive joue sur une frustration qui en soi est un questionnement sur ce que doit être une oeuvre cinématographique. Sa structure globale permet à David Lynch de mettre au coeur de son film une problématique forte centrée sur la place de l’intrigue et du spectateur. Il n’est pas le premier ni le dernier à aborder cette problématique.
Ainsi, le mélange de divertissement et de problématique tend à diluer le questionnement s’il ne le dissout pas purement et simplement.

2.3- Comment le jeu de rôle pourrait-il relever de l’art ?
Oubliez toute classification des soi-disant arts, qui ne sont que des jugements de valeur arbitraires ou idéologiques. L’art est potentiellement émergent de tout médium, de toute activité humaine, tel que nous l’ont appris les artistes des dernières décennies. Il n’y a aucune classification à faire entre la musique, les arts plastiques, le théâtre, les performances, la littérature, le cinéma ou la bande dessinée et les autres. Ce ne sont que des supports différents pour la création.
Un film, bien qu’étant une création, n’a pas l’assurance d’être artistique par le simple fait qu’il appartient au champ des productions cinématographiques. Selon le préhistorien de l’art Emmanuel Anati, la différence entre art et création se situe au niveau de la « vérification », soit la nature réflexive pouvant s’associer à la création. Vérifier, c’est situer son travail dans le champ artistique de son époque, le confronter à ce qui a été fait avant et cerner sa problématique.

2.3.1- Tout jeu de rôle est créatif.
– Voici la définition du jeu de rôle que j’emploierai afin de bien clarifier mon propos :
« Le jeu de rôle est une activité de groupe où chacun participe à la création d’une histoire, en effectuant des choix selon la situation de la fiction »
. Je ne m’intéresse donc volontairement pas au « jeu de rôle grandeur nature » ni aux jeux vidéos, je laisse ces champs de recherche à ceux qui veulent l’explorer.
– L’activité « jeu de rôle » n’est que ce qui se situe pendant la séance de jeu, d’exploration d’une fiction construite collectivement.
Les règles et le contenu pré-écrits ne sont qu’une préparation et un soutien à l’activité. Si un point de scénario ou de règle n’est pas exploré pendant la partie, il sera tout simplement inexistant.
Le texte des règles du jeu et de présentation de l’univers sont comme une partition de musique : la partition n’est pas la musique, mais elle joue un rôle essentiel sur la forme de l’oeuvre.
– Pour que cette oeuvre soit d’art, une problématique devra en émerger.
Mais pas n’importe comment :
Elle doit être immanente au médium et donc prendre racine dans la totalité de ce qui constitue la forme du jeu de rôle.
Elle doit être prédominante à tout autre but dans la partie, y compris se divertir.
Elle doit naître de la créativité des participants (et non seulement d’un MJ ou de l’auteur du livre de jeu).
Elle doit être partagée et perceptible, même si c’est à posteriori.

Tout ceci concerne le fait de continuer à pratiquer une activité qualifiable de jeu de rôle, que l’on fera art. Il est possible de faire de l’art autrement que de la façon dont je le développe, avec des activités plus ou moins proches du jeu de rôle, sans en être vraiment.
Il est important de comprendre que la teneur artistique d’une partie de jeu de rôle dépend des joueurs et de leur réceptivité aux stimulus du jeu et à l’émergence de la problématique.
Donc, un auteur peut tout mettre en oeuvre pour rendre artistique son jeu, le pouvoir de le concrétiser en revient aux joueurs.

2.3.2- L’expérience est le coeur du jeu de rôle
Le jeu de rôle ne peut être légitimé au regard d’autrui car c’est une activité qui ne peut être appréhendée par le néophyte. Elle ne peut être appréhendée que par l’expérience, tout comme je ne peux raconter un tableau à quelqu’un et espérer qu’il partage l’expérience que j’en ai eue.
Fréquemment, en tentant d’expliquer à des rôlistes dont la pratique du jeu de rôle est plutôt classique, en quoi consistent des formes de jeu de rôle innovantes, je me heurte à un mur d’incompréhension et de préjugés. C’est comme tenter d’expliquer ce qu’est le jazz à quelqu’un qui ne connaît que la musique classique, avec des mots pour seul outil.
De la même façon, un rôliste ayant toujours eu une expérience purement divertissante aura peut être des difficultés à appréhender la portée artistique de son activité. Cela ne signifie pas pour autant que rapporter une expérience n’ait pas d’intérêt, mais cela questionne sur la façon dont on peut le faire.

2.3.3- Propager vos oeuvres
Une partie de jeu de rôle est éphémère et son public restreint. C’est le cas de nombreuses musiques, pièces de théâtre, performances ou actions dans l’art contemporain. Si vous voulez entreprendre d’exposer votre séance de jeu dans une galerie, il faudra alors sans doute trouver un moyen d’en conserver une trace ou de répéter l’expérience. Mais ce n’est pas ce qui conditionne la portée artistique d’une activité, bien qu’elle fasse partie de sa reconnaissance par un public.
Cela est d’autant plus pertinent en jeu de rôle du fait que les participants sont à la fois auteurs et spectateurs de leur création collective. Le public est donc indissociable de cette activité créatrice. Ce n’est pas le nombre de spectateur qui fait la qualité ou l’existence d’une oeuvre d’art.
Maintenant, pensez-vous qu’un public extérieur à la séance de jeu, en simple spectateur pourra saisir la substance de la partie ?
Cette question me semble épineuse. Il en reste que les enregistrements de séances de jeu de rôle donnent souvent plus l’impression d’autistes qui s’agitent inutilement autour d’une table, que celle de créateurs en plein processus intellectuel collaboratif. C’est en cela que le moyen de conserver une trace doit être mûrement réfléchi. Je pense que la retranscription à l’écrit est sans doute le meilleur moyen d’approcher le résultat d’une partie pour la part imaginative que l’écrit laisse au lecteur, quand une vidéo ou un enregistrement sonore pèchent par la mise en évidence des hésitations, du manque de force inhérent à l’improvisation imaginative confrontée à des supports desquels on crée des oeuvres généralement extrêmement travaillées.
Il ne s’agit donc pas de présenter un compte-rendu de fiction voulant rivaliser avec un roman, mais bien de restituer l’expérience, avec tout ce que cela comporte de méta-jeu et de mécaniques.

3- La part de l’auteur
Bien que j’aie présenté le jeu de rôle comme étant ce qui se déroule durant une partie, cette partie prend elle-même racine dans la structure du jeu (game) conçu, lui, souvent par une personne étrangère au groupe qui va vivre l’expérience.
Pensez donc que bien que l’expérience de chaque groupe soit différente, un texte présentant un jeu dont l’ensemble des modules orientent les joueurs vers une certaine problématique est déjà en soit une grande part de la création rôlistico-artistique. C’est sans doute également le plus simple moyen de propagation – mais non le seul – d’une oeuvre rôlistique. Vous y faites une proposition que chacun s’approprie et c’est une force. On ne peut empêcher chaque spectateur de s’approprier une oeuvre, et c’est tant mieux, car c’est souvent l’interprétation et l’assimilation produites qui le touchent le plus.
« Je veux donner aux spectateurs une ébauche de scène. Si vous leur en dites trop, ils n’y apporteront rien d’eux-mêmes. Proposez-leur juste une suggestion, et vous les ferez travailler avec vous. C’est ce qui donne son sens au théâtre : quand il devient un acte social. » (Orson Welles 1938)
Dans une plus large mesure, c’est ce que vous ferez en créant un jeu de rôle. Vous avez les moyens d’orienter les parties de ceux qui expérimenteront votre proposition, proposez-leur des espaces délimités de création et orientez l’ensemble sur votre problématique, c’est ainsi que vous produirez des instants artistiques par ce vecteur.
Ce n’est pas la condition sine qua non pour faire de la séance de l’art, mais cela y contribue considérablement. Comme un compositeur peut écrire une partition très libre que les instrumentistes s’approprient et autour de laquelle ils improvisent. Il crée une structure, un cadre qui peut bien souvent devenir le coeur des parties et de la forme qu’elles revêtent. L’auteur de jeu de rôle est un compositeur.

3.1- Exemples de jeu de rôle à problématique
Dogs in the Vineyard (Vincent Baker) est un concept extrêmement subtil bâti autour d’une problématique forte que j’analyse ici avec mes propres mots : Quand la morale justifie-t-elle la violence ?
Sens Hexalogie (Romaric Briand) est structuré par de nombreuses problématiques, mais il me semble que la principale est tournée vers l’imbrication de la fiction dans la réalité.
My life with Master (Paul Czege) est une critique virulente sous forme de pseudo parodie, des jeux de rôles tels qu’ils sont couramment pratiqués : Un maître despotique qui martyrise ses servants. http://www.halfmeme.com/master.html
Psychodrame, une de mes tentatives de développer une problématique dans un jeu de rôle : quand le jeu de rôle nous confronte à notre propre existence, que devient l’enjeu réel ?

Si nous analysons un jeu tel que Dogs in the vineyard de Vincent Baker, nous vérifions que tous les niveaux de conception du jeu nous emmènent vers une direction précise où les situations entraînent des choix de la part des joueurs autour des questions de justice, de morale et de violence.
C’est ainsi que nous pouvons considérer que l’auteur d’un jeu de rôle peut considérer son travail comme étant artistique, dans le sens où il présente un matériau travaillé, dont la cohérence des choix influeront sur les parties jouées et sur la possibilité de l’émergence d’une problématique. L’auteur a donc une part potentielle, mais importante sur le résultat final.

4- L’esthétique en JDR :
L’esthétique se préoccupe de la relation complexe entre fond et forme en art. Au XXIème siècle et depuis plus d’un siècle, on en est arrivés à l’idée que le beau était subjectif. L’artiste cherche donc à faire une proposition esthétique depuis son propre point de vue. Il n’a pas vocation à l’universalité, bien que la portée artistique de son oeuvre puisse difficilement être contestée. Si tel est le cas, on entre dans les problématiques d’avant-gardes.
L’esthétique en jeu de rôle se situe à plusieurs niveaux, et pas seulement dans l’imagination dont a fait preuve l’auteur pour définir son univers :
Dans Sens Hexalogie, Romaric Briand met à jour l’importance de considérer que la conceptualisation d’un jeu de rôle est une modélisation d’une vision de l’homme et du monde. Ainsi, Sens est entièrement modélisé à partir des théories du philosophe Ludwig Wittgenstein, pour qui le langage est un miroir de la structure du monde.

Si l’art est immanence, cela nécessite une appropriation de la forme de vos créations, car c’est par une compréhension des enjeux formels que l’on peut en faire émerger une problématique.
Pour cela, je vous propose plusieurs pistes :
– La synesthésie.

– LNS & Big Model : Big Model (Wikipedia)
LNS et autres sujets de théorie rôliste (par Ron Edwards)
GNS theory (par Eero Tuovinen)
Théorie forgienne (par Ben Lehman)

– Le détournement ou le jeu avec le jeu : Martin Le Chevallier, jeux vidéo artistiques

***

Je vous propose de discuter plus avant de tout cela sur le forum de Limbic systems.

 

Voici le design de la couverture de Prosopopée.
Réalisée pendant une phase d’insomnie à  la cortizone…

Qu’est-ce que ça vous évoque ?

 

J’ai ajouté des fictions pour illustrer et améliorer la compréhension du jeu. J’ai également affiné son système à partir des enseignements tirés des rapports de partie.

Le jeu est désormais tout à fait opérationnel, je compte poursuivre les playtests afin de consolider les derniers détails.

Téléchargez Prosopopée

Creative Commons License
Prosopopée by Frédéric Sintes est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité-Pas d’Utilisation Commerciale-Pas de Modification 2.0 France.

Voici quelques rapports de partie pour vous donner une idée de ce que le jeu permet de jouer :

Le hameau des livres

Du givre sous les racines

Aigrettes solaires

Bougies dans le vent

 

Histoire de poche est un mini JDR dans lequel j’ai condensé ce qui me semble primordial pour obtenir un jeu fonctionnel avec des moyens minimums.

Vous pouvez l’utiliser pour jouer une mini scène pour faire découvrir le JDR à  des néophytes, ou pour jouer pendant les trajets de voiture…

Voici la version bêta :
Téléchargez Histoires de poche

 

Je suis heureux de vous annoncer que Les Rats de Marée participent à une compilation de talents (connus et moins connus) chez Wagram.

Vous pouvez écouter ici trois de leurs chansons : http://profile.myspace.com/index.cfm?fuseaction=user.viewprofile&friendid=102125375

 

Ce billet est le quatrième d’une série, donc si vous ne voulez pas commencer par la fin, rendez vous au début.

Les antagonistes
Je suis généralement assez hostile aux concepts manichéens pour leur portée puérile et religieuse. Du coup, mettre un méchant dans une histoire, bon, ben ça arrive… Mais ce qui différencie le méchant de l’antagoniste, c’est que l’antagoniste n’est en principe ennemi que du ou des protagonistes. Du coup, on peut s’amuser avec un personnage plus moral que les PJ qui se retrouve contre eux, alors qu’ils pensent œuvrer du « bon côté ».
Les antagonistes peuvent bien sur être plusieurs, qu’ils soient ensemble ou pas, une organisation, une personne… L’antagoniste peut être simplement en concurrence avec le ou les protagonistes, il n’a pas d’antipathie à leur égard (au début), ou bien il peut être viscéralement antipathique envers le ou les protagonistes.

L’important, c’est de définir son but. Ça peut aller de « veut découvrir la pierre philosophale (avant les PJ) » à « veut tuer tel PJ pour se venger ». Ensuite, on se demande pourquoi et ça suffit généralement à établir quelques traits pour ce PNJ. Note : les PJ peuvent être ou devenir antagonistes les uns envers les autres. Dans ce cas, c’est souvent très intéressants de les laisser se crêper le chignon, me semble-t-il. Vous n’aurez peut être même plus besoin de scénario…

Un antagoniste peut se révéler par un conflit ou peut être fabriqué pour l’être. Il suffit pour cela d’utiliser les traits des PJ et d’utiliser des traits en conflit ou des antipathies. Nous ne nous attarderons pas sur ceux qui se révèlent antagonistes, s’ils n’apparaissent que peu de fois, afin de nous concentrer sur le concept de « grand méchant » revu et corrigé. =D

L’antagoniste doit-il être un pivot parmi les autres ou peut-il être « l’ennemi récurrent » ?

A priori, si vous créez un antagoniste relativement puissant, les PJ auront beaucoup de mal à obtenir ce qu’ils veulent de lui. Un antagoniste faible prend le risque de se faire miter la tronche allègrement et de servir davantage de souffre douleur s’il est récurrent, plutôt qu’autre chose. L’un des problèmes relatif au PNJ récurrent, c’est qu’il ne doit en aucun cas devenir protagoniste à la place des PJ. En effet, à priori chaque PJ est le protagoniste de son joueur, même s’il peut être l’antagoniste d’un autre PJ.

Un PNJ peut donc apparaître à plusieurs reprises, il peut même évoluer pour rester concurrentiel face aux PJ, mais il ne doit pas leur damer le pion quant à l’importance qu’il prend dans le récit. Si un tueur sanguinaire cherche à massacrer tout le monde et que les PJ ne parviennent jamais à l’arrêter, il sera fatalement un antagoniste récurrent. Mais il faut permettre dès le départ aux PJ de lui régler son compte, pour cela, évitez les longues intrigues avec plusieurs confrontations de prévues avec ce PNJ, sinon, vous empêcherez toujours les PJ de lui régler son compte, simplement parce qu’il revêt le costume du super méchant et que s’ils le marravent à la première rencontre, votre intrigue est foutue en l’air. S’il est suffisamment puissant et que vous menez ses conflits avec poigne, il devrait s’en sortir au départ, mais il ne faut pas compter là -dessus et ne pas envisager la façon dont doit se terminer une rencontre avec ce PNJ. Vous pouvez lui attribuer des traits de sauvetage, éventuellement avec par exemple des collègues, amis ou bras droit qui ne manqueront pas d’utiliser l’hélico de leur boss ou leurs pouvoirs pour venir le secourir… ^^

Donc, la première chose importante pour un antagoniste principal et récurrent, c’est de déterminer son but et ne pas prévoir d’issues à chaque scène, mais simplement des situations initiales problématiques dont il pourrait être l’instigateur.

Par exemple, vous avez décidé que c’est ce PNJ qui a tué le père de tel PJ, qui a détruit telle forêt, demeure de tel autre PJ et qui veut réinstaurer un état religieux alors qu’un dernier PJ est un grand défenseur de la laïcité…

Maintenant la grande question est comment faire en sorte que les PJ découvrent qu’il est le coupable ? Je tenterai d’y répondre à la fin de ce post…

Les antagonistes sont souvent le moteur dans bon nombre d’histoires. En effet, ils luttent contre les protagonistes et c’est cela qui les fait réagir. Souvent, en JDR, les PJ n’ont pas de buts tant qu’on ne menace pas leur propre vie ou qu’on ne leur donne pas une mission… A part sauver les chats dans les arbres ou aider les mamies à traverser la route, les super héros n’ont généralement pas grand-chose à glandouiller. Les super méchants, incarnations de Satan (étymologiquement l’adversaire) sont là pour leur donner du super boulot. Dans ces mondes là , s’il n’y avait pas de méchants, il n’y aurait ni accidents, ni famines, ni crimes, ni délits…

Dans certains cas ça peut être pratique. Dans Harry Potter ou dans le Seigneur des anneaux, pour ne citer qu’eux, sans Voldemort, Saroumane, Sauron etc. les personnages apprendraient gentiment leurs sorts, couperaient des arbres et partiraient à la chasse entre amis…
Donc dans Harry Potter JDR, on peut imaginer qu’un mage noir voudrait pénétrer dans Poudlard pour y récupérer un objet rare et puissant (bon, je sais, je ne fais pas dans l’innovant).

Bon, j’exagère un peu, car le principal dans les bouquins de J.K.Rowling, ce sont les mésaventures scolaires de Harry, comment sa célébrité lui joue des tours, comment les injustices que lui inflige son prof de potions lui donnent la rage, comment il viole le règlement pour pouvoir bénéficier d’une sortie scolaire etc.

Généralement l’antagoniste met un plan en œuvre. En effet, rares sont les histoires o๠le protagoniste ne subit pas et ne fait pas que réagir. Mais ça existe, les histoires dans lesquelles un protagoniste va tout faire pour obtenir quelque chose et va se heurter à des petits problèmes !
Vous pouvez donc définir ce plan. Puis vous avez deux options : soit préparer la façon dont les PJ vont découvrir ce plan (du coup, vous pouvez utiliser le principe des clefs et des portes), soit vous improvisez à partir du but du PNJ et des occasions données par les situations initiales et les PJ. (à vous de me dire ce qui fonctionne le mieux, vu que pour ma part, j’ai presque tout le temps préparé les indices de façon précise, jusqu’à maintenant). Dans le premier cas, les pistes permettant aux PJ de savoir ce qu’il se trame peuvent être considérées comme des clefs. Dans le deuxième, il faut exploiter les situations initiales problématiques pour permettre aux PJ de savoir ce qu’il se trame et leur permettre des affrontements.

– L’antagoniste met un plan en œuvre :
1- Le protagoniste ne le sait pas et doit réagir pour ne pas laisser l’antagoniste réussir et subir ses desseins.
2- Le protagoniste le découvre et peut tenter de le prendre à son propre piège. Certaines histoires fonctionnent sur ce mode (Innocence, de Mamoru Oshii, par exemple)

– L’antagoniste agit en fonction de son but (sans d’indices préconçus) :
1- Le protagoniste découvrira des indices rapidement (reveal actively), et un conflit avec l’antagoniste devra ensuite favoriser l’un ou l’autre des deux partis en guise de développement principal.

Les parties « illusionnistes » ou « participationnistes » permettent rarement d’offrir la liberté aux joueurs d’élaborer un plan, sauf si on prévoit à l’avance ce qu’ils devraient faire… Les parties « esprit pionnier » peuvent le permettre mais comptent sur la vivacité d’esprit des joueurs pour deviner au plus vite ce qu’il se passe et être plus malins que le PNJ.

Je pense qu’une formule qui conviendrait relativement bien au « Jeu de basse », ce serait de lier les situations problématiques à un antagoniste, ou à une société secrète ou ce que vous voulez. Les embûches que vont rencontrer les PJ seront causées par des PNJ qui sont liés à cet « antagoniste final » ou « boss » ^^. Les clefs données (reveal actively) ou gagnées (par conflit) pourraient également converger vers cet antagoniste.
Enfin, le but de l’antagoniste doit s’insérer dans le but des PJ. Si les PJ veulent sauver le monde, l’antagoniste veut le soumettre ou le détruire, si les PJ veulent arrêter la guerre, l’antagoniste voudra semer le chaos et mettre le monde à feu et à sang… bon, ce sont des exemples limite caricaturaux, mais ils illustrent bien l’idée.

Pour la partie d’Harry Potter dont j’ai fait le compte-rendu, mon scénario se résumait à :
– Un élève lance un sortilège de contrôle sur un autre élève somnambule, afin de voler dans les dortoirs de nuit.
– Quelques victimes : 1 a perdu son furet, 1 son balais magique etc. jusqu’à ce qu’un PJ se fasse voler à son tour.
– Le somnambule possède un pyjama grenouillère nounours en peluche (comme Lain) il pourra laisser de traces sur les lieux du crime.

Et voilà , j’ai laissé les joueurs décider de ce qu’ils allaient faire, ils ont rencontré un PNJ qui cherchait son furet, puis j’ai mis en scène une dispute entre élèves, à la suite de quoi ils ont découvert un autre vol (sans rapport avec leur succès au conflit, simplement, j’ai décidé qu’à l’issue de chaque conflit, ils découvriraient un indice, quelle qu’en soit l’issue), puis l’un des PJ se fait voler un objet cher. Et là , ils ont tout pris en main, ils ont interrogé des élèves, ils ont guetté dans les couloirs, ils ont découvert le somnambule, puis celui qui le contrôlait et un grand conflit s’est engagé (assez palpitant). C’était très cool !

Bon, ceci reste une base, on doit pouvoir la détourner de maintes façons. Et surtout, ce dernier point est facultatif. Vous n’êtes pas tenus de mettre un antagoniste principal dans votre scénario et chaque situation problématique peut donner son lot de PNJ antagonistes. Néanmoins, l’avantage de l’antagoniste (qui peut aussi bien être une personne, qu’une maladie qui se propage, une divinité etc.) c’est qu’il fait office de liant sur l’ensemble d’un scénario.
La question que je me pose est la suivante : cette idée de placer un « ennemi » ne force-t-elle pas l’engagement du personnage et du joueur et ne déroge-t-elle pas à la théorie de l’engagement ? Si on poursuit une crapule, c’est comme si on était payé pour suivre un scénar (le personnage en tout cas), ça justifie tout sans effort. C’est pourquoi les meilleurs antagonistes sont les antagonistes controversés. Et enfin, je vous dirais qu’il est cohérent de mettre un antagoniste récurrent quand les PJ ou le jeu lui-même s’y prêtent.

Un personnage attaché à son chien peut avoir des problèmes avec la SPA parce que des voisins entendent le chien pleurer, croient qu’il est maltraité… Il y a plusieurs antagonistes temporaires, mais pas nécessairement de « grand méchant ». Les voisins croient bien faire et les membres de la SPA font leur boulot…

Autre exemple : un PNJ très cruel, aimant manipuler les gens et les faire souffrir, si l’on se rend compte que c’est à cause de l’un des PJ qu’il est comme ça, ça peut être cool. Si les PJ n’arrivent pas à contrer ses arguments liés à ses considérations sur l’humanité, il a beau être abominable, que fait-on contre quelqu’un d’abominable qui a raison ?

Plus un ennemi est controversé, plus il fait poser des situations avec des problématiques du genre de ce que j’ai décrit plus haut, plus il sera question de choix, de sacrifices, plutôt que de victoire et de défaite.

 

Les clefs
Prenons le cadre d’une enquête. Mis à part mettre des panneaux indicateurs de la marche à suivre, il est difficile de faire jouer des scénarios d’investigation aussi fun que les romans ou films du même genre, car si l’on respecte la liberté de choix du joueur, on ne peut pas préparer méticuleusement une découverte d’indices bouleversante à chaque étape. Dans un film, ou un roman, l’auteur a le temps de préparer bien méticuleusement son intrigue et surtout la façon dont le héros découvre les indices. Il peut ainsi simuler l’intelligence d’un personnage car il aura bien le temps de peser chaque possibilité, se documenter etc. Les pauvres joueurs, à moins d’être d’une perspicacité et d’une culture extraordinaire, auraient bien du mal à résoudre des enquêtes de fou furieux ou en plus généralement, le MJ décide de quand chaque indice peut être découvert.
Que fait-on si les PJ ne trouvent pas un indice ? Doit-on rester bloqués comme dans un jeu vidéo ? Doit-on s’occuper d’autre chose en attendant de revenir à la charge ? L’échec est-il possible ? Le modèle de l’enquête me semble particulièrement intéressant à résoudre, car il créerait une porte ouverte pour tous les styles d’intrigues.

On peut établir deux grandes catégories d’indices : les indices avantageux et les indices capitaux.
– Les indices avantageux permettraient aux joueurs de gagner un avantage sur un éventuel antagoniste, ou de se rapprocher plus rapidement du but. Ces indices peuvent être manqués sans problème, puisqu’ils constituent une sorte de bonus. Vous pouvez donc stimuler l’esprit ludique de vos joueurs avec ce type d’indices sans problèmes, à condition que ça fasse partie de vos orientations de jeu.
– Les indices capitaux sont sensés faire avancer l’enquête. Si on en rate un, il est fort probable que l’enquête tombe à l’eau ou piétine. Mais encore une fois, une des règles d’or d’une bonne histoire est la suivante : si un personnage s’ennuie, faites en sorte que le spectateur non. Les films contemplatifs utilisent un langage visuel très riche. Si l’histoire n’avance pas vite, les images et le son disent énormément de choses. Considérez donc que vos joueurs ne doivent pas être confrontés à des échecs quand leurs personnages le sont. Éventuellement, il pourrait être intéressant de considérer que si un personnage n’obtient pas un indice, il sera rapidement amené à éprouver un conflit d’une plus grande intensité dramatique. Si par exemple en interrogeant un indic, le PJ n’a pas obtenu l’indice qu’il désirait, il peut tenter de le revoir pour lui soutirer l’indice, mais cette fois, l’indic n’est pas tout seul –

—Petite parenthèse—
Il me semble que dans Afraid, de D. Vincent Baker, les joueurs prennent part à la création d’indices (ou les créent eux-mêmes). De même dans Aux frontières de R’lyeh Bien joué!
Je tiens à dire que je trouve cela remarquable, même si cela me paraît tout à fait profitable aux jeux d’enquête, surtout sans MJ, je veux creuser davantage du côté où le MJ prend un plaisir machiavélique à pondre une super intrigue. Ne l’ayant encore jamais expérimenté, le peu de rapports de partie que j’ai eu le loisir de lire m’a étonné par sa fertilité scénaristique (dans le sens d’idées d’articulations pour faire avancer le récit), bien loin des lieux communs poncés et reponcés jusqu’à la moelle par les MJ. Bon, en même temps, nous les MJ ne sommes pas toujours aussi brillants que ce que l’on voudrait et surtout, on ne peut pas exiger des joueurs qu’ils le soient autant que Sherlock Holmes. Donc, cette méthode est sans doute excellente, mais ce n’est pas ce que je cherche ici ^^.

Pour moi un JDR n’a pas nécessairement besoin de MJ, d’ailleurs dans le jeu Psychodrame que je suis en train de créer avec Magali, il n’y a point de MJ. Donc, que les joueurs puissent prendre part à la création « live » du scénario me plaît beaucoup, mais me semble pour le moment difficilement partageable avec l’idée d’un scénario écrit à l’avance par le MJ.

Dans les métiers de la création narrative, il est généralement impossible de ressentir soi-même ce que l’on fait ressentir au public. Certaines activités comme le théà¢tre sont déjà moins avares de relation au public. Mais j’ai toujours considéré cela comme la malédiction des auteurs. Or, ce qui m’a fait revenir au JDR il y a quelques années, c’était le plaisir de pouvoir faire vivre mes propres histoires à mes joueurs, lire la surprise dans leurs yeux, le plaisir ou la peur. Bien sur, il s’agit d’émotions par compassion, les mêmes qui nous assaillent quand on plonge dans un bon film. Mais enfin, j’ai trouvé ce rapport à un public qui me manquait tant ailleurs. C’est en cela que même si ça ne fait pas tout, j’ai envie de développer une forme d’écriture scénaristique qui permet au MJ d’écrire des histoires dans lesquelles il déverse ses tripes, tout en respectant ce qui me semble aujourd’hui primordial dans le JDR : la liberté du joueur. —Fin de la parenthèse—

Revenons à nos moutons
A mon sens, l’échec doit être une option pour les personnages, mais pas pour les joueurs. Car pour moi le plaisir du JDR est ailleurs que dans la simple résolution d’une enquête. De la même manière que je ne suis pas du tout friand des sanctions du type : « un personnage est ko, le joueur ne joue pas pendant ce temps », je n’apprécie guère les parties où en attendant de pouvoir trouver un indice qu’on a raté, on s’occupe d’autre chose (bon, encore, il y a des MJ qui meublent plutôt bien le hors scénar) ou on reste tout simplement bloqués. A quoi ça rime d’être mis hors jeu dans un JDR ? On n’est pas au ballon prisonnier ! Et même dans le ballon prisonnier, les joueurs hors-jeu continuent de jouer ! Dans un jeu comme les loups-garous de Thiercelieux, l’élimination progressive des joueurs fait que l’on fait tout pour ne pas perdre, mais rend le jeu particulièrement chiant quand à 20 participants, on est le premier à quitter la partie – Bon, par contre, selon le type de jeu, la mort d’un PJ peut être tout à fait bienvenue, car d’un point de vue dramatique, ça peut être terrible ! Mais cette mort sera d’autant plus intéressante qu’elle aura un sens. Le PJ qui meurt en sauvant quelqu’un, classique, mais terriblement émouvant. Celui qui meurt d’une overdose, alors qu’il avait décidé de décrocher – sympa, aussi, non ? Finalement, j’ai l’impression que ce genre de choses arrivent plus souvent quand on ne les prévoit pas, mais que le moteur du jeu et de la partie s’oriente dans ce sens.

Je reviens aux clefs
On pourrait imaginer un contrat simple en MJ et joueur : à chaque fois que vous choisissez de suivre la voie de l’enquête, je vous propose un indice, ou plus précisément une « clef ». La différence est que l’indice sous entend que le joueur devra se décarcasser intellectuellement pour pouvoir faire avancer l’enquête, alors qu’une clef peut simplement permettre d’ouvrir une porte.
On peut même imaginer proposer un mélange aux joueurs : celui qui remporte le conflit choisit l’indice, ou même : une fois c’est le MJ qui donne un indice, une fois c’est un joueur (notons qu’il faudra au MJ une super capacité d’improvisation pour pouvoir lier son intrigue aux élucubrations des joueurs, sauf s’il n’a que des scènes et que les indices sont créés de toute pièce pendant la partie, comme de simples pivots au récit – )
Je ne sais pas encore si la clef doit être donnée automatiquement à la fin du conflit, quelle que soit l’issue, ou si l’on peut jouer sur l’idée de victoire ou de défaite – Seulement, avec un système comme celui de DitV, la notion de victoire ou de défaite est extrêmement floue. Gagner un conflit peut être vécu comme une défaite (genre le coup de mon personnage qui veut redresser une prostituée et qui finit par la tuer – ). Donc, cela paraît possible et même plus intéressant de jouer dans certains cas les clefs à l’enjeu. Ainsi, la notion de victoire ou de défaite est directement liée à l’issue du conflit et à l’obtention ou non d’un indice. Ainsi, un indice raté n’est pas perdu, il est simplement repoussé à plus tard et c’est là que vous en profiterez pour compliquer le prochain conflit –
D’autres indices peuvent être révélés pendant ou à la fin de conflits dont l’enjeu n’est pas lié à la quête de clefs. En outre, les clefs peuvent être données simplement dans les phases de recherche, d’après le conseil de D. Vincent Baker : « Reveal Actively », je vous renvoie pour cela au thread suivant

La nature des clefs
Les clefs peuvent être mises en scène par le moyen de personnages ou par des éléments du décor. Elles peuvent se trouver dans un endroit précis vers lequel on orientera les PJ, c’est le cas dans les scénarios prônant une maîtrise de forme « esprit pionnier » on peut également les organiser dans un ordre précis d’apparition, tel que c’est souvent agencé dans les scénarios favorisant « l’illusionnisme » ou le « participationnisme ». Cela demande, à mon avis, une grande réflexion. Disposer des indices sur un plan relève davantage du jeu, leur attribuer un ordre précis relève davantage du récit. Ce qui constitue un frein considérable à la liberté du joueur dans ce deuxième cas, c’est que les personnes qui écrivent ces scénarios tendent à détailler la mise en scène au point de prévoir comment les PJ vont arriver à tel indice, qu’est-ce qu’ils devront faire, qu’est-ce qu’ils ne devront pas faire, comment les empêcher de faire quelque chose qui les détournerait du scénar et surtout comment ils doivent finir la scène.

Je propose d’alléger considérablement la mise en scène, voire, de la réduire au strict minimum. Éventuellement, dissocier le cadre, les personnages, le décor et les clefs, afin de pouvoir jongler en fonction des décisions des joueurs. Mais dans ce cas, il est important pour les joueurs de savoir que lorsqu’ils mettront les clefs en jeu, ils pourront progresser dans l’histoire, alors qu’au sein des rencontres prévues dans le scénario, la plupart des clefs seront dévoilées progressivement (mais pas toutes).

Qu’est-ce qui poussera un joueur à mettre une clef en enjeu : savoir qu’un PNJ détient des infos, par exemple. Il est sans aucun doute, beaucoup plus efficace d’être clair sur la présence d’une clef dans un endroit ou chez un PNJ. Et un indice raté quelque part pourra se trouver ailleurs pour compliquer son obtention après un premier échec : après l’effraction des PJ, le propriétaire des lieux a déménagé dans un autre endroit et y a installé un système de surveillance…

Lorsque les clefs se trouvent dans un lieu, et que les joueurs décident de les y chercher, le mieux est sans doute soit de les « révéler activement » soit de jouer un conflit contre le lieu, contre ce qui s’y trouve, contre d’autres personnages qui recherchent les indices, contre des forces obscures qui veulent nous empêcher de le trouver etc. Finalement, l’indice est une clef particulière, c’est souvent une clef dissimulée.
Si l’on compare à un film. L’investigateur peut entrer sur le lieu du crime, il prend quelques renseignement, questionne les policiers, entre dans la pièce du meurtre, voit directement les traces de pas sur le sol, en déduit le type de chaussures que porte le meurtrier, ce sont bien les mêmes que celles de la dernière fois – (Révéler activement), mais il décide d’observer plus précisément la pièce. La lumière faible du lieu le gène, il prend donc une torche et observe du côté de la bibliothèque, poussiéreuse mais tout est en ordre, il fouille dans les cendres de la cheminée et découvre des pages qui ont été mal consumées (conflit, dont l’enjeu est l’indice). On peut imaginer que chaque succès de l’investigateur lui donne une piste et s’il gagne le conflit, il découvre l’indice. S’il ne gagne pas, il ne découvre pas l’indice, mais pourra revenir à la charge, ou le découvrir autrement. Finalement, s’il choisit la bibliothèque à la fin, l’indice pourra s’y trouver. Le MJ pourrait même simplement indiquer le contenu de l’indice quand le joueur aura décrit la forme de l’indice et comment il le trouve – mais bon, je ne suis pas trop fixé à ce niveau, concernant le partage d’autorité –
Pour faire simple, le MJ pourrait déjà modifier la nature de l’indice (et éventuellement son contenu) en fonction de l’endroit où il le trouve.

L’important est plutôt ce vers quoi l’indice oriente, plus que la manière de le trouver, si l’on veut que le scénario soit intéressant en tout premier lieu. Et pour que le récit soit intéressant, un conflit ferait sans doute tout à fait l’affaire.

Cela reste à tester et je compte bien le tester sous peu.

Maintenant, en revenant au concept élargit de « clef », le principe est simplement d’orienter les joueurs vers les « portes » qui sont les obstacles (également, dans le cas d’indices dissimulés, une clef peut orienter vers une autre clef, précédée d’une porte que sera le conflit qui permettra d’y accéder), ainsi, le MJ peut prévoir des relations entre plusieurs clefs et plusieurs portes tout au long du scénario et dévoiler sa petite manigance scénaristique en coup de théà¢tre ou progressivement. Je pense que la relation entre les « indices » doit être évidente au moment où l’on a les éléments en main. Dans un film, le scénariste se débrouille toujours pour qu’on ait tous les éléments de l’intrigue à la fin. Une confusion dans l’ordre peut être utile pour créer un effet de surprise ou de doute, mais une histoire dont il manque des bouts est une histoire foirée. Si une chose est arrivée sans que les personnages ne soient au courant, soit vous vous démerdez pour qu’ils l’apprennent plus tard, ce qui peut faire l’objet d’un indice intéressant, soit vous jouez une scène en off, que les personnages ne sauront pas mais les joueurs oui.

Et puis à quoi bon écrire une intrigue machiavélique si les joueurs n’en ont que la moitié ?

Donc, je préconise
1- d’écrire une intrigue en grandes lignes par une imbrication de clefs sans se soucier de la mise en scène
2- de faire créer les PJ par les joueurs (ça pourrait se faire avant l’étape 1, même)
3- de créer des situations initiales problématiques liées aux traits des PJ
4- d’ajouter un peu de décor et éventuellement d’ajouter un peu de liant à tout ça
5- de finir par une scène ouverte et arrêter de renchérir par de nouveaux obstacles et conflits quand vous êtes rassasiés.

 

Les obstacles (ou portes)

En dramaturgie on considère que pour qu’un protagoniste soit attachant, il doit souffrir. Il est même avéré que dans une histoire où le personnage principal est mal défini, c’est celui qui souffre le plus que les lecteurs ou spectateurs reconnaissent comme protagoniste principal. C’est dû à la compassion dont sait faire preuve l’être humain (compatir = souffrir avec).

Je vous propose donc de construire des obstacles à votre guise, en proposant une difficulté progressive. En effet, des enjeux de difficulté égale rendent une histoire plate (ou du moins, plus plate que ce qu’elle ne serait avec cette escalade de difficulté). Vous me direz : « mais il nous parle de difficulté alors qu’il n’aime pas la compétition ni les échecs ». Mais la difficulté en JDR, grâce à des systèmes comme celui de DitV ou autres ne dit pas si l’on réussit ou si l’on échoue, mais bien souvent « qu’a-t-on du sacrifier ? ». Et c’est bien plus croustillant. Ainsi, on rejoint le concept de souffrance du personnage.

Concernant mon JDR Démiurges, je tente d’établir des séries de problématiques potentielles, liées aux enjeux qui peuvent découler de la prémisse et des personnages. Par exemple, un personnage versé dans l’héroïsme pourra être confronté à des problématiques du genre :
– puis-je rendre la justice si cela met en péril la vie d’innocents ?
– où se situe la frontière entre la justice légitime et la justice légale ?
– Quelle choix ferais-je entre sauver une personne qui m’est chère et sauver 10 innocents ?
Etc.

Je rend à César ce qui lui appartient, cette idée est à l’origine celle d’Artanis. Elle fait partie d’un de ses projets : Le monde fuyant.

Avec cela, je crée des situations initiales qui posent ces problématiques. Mais je me dis que si je veux que les joueurs restent accrochés, il peut être intéressant que ces situations problématiques aient des liens, conduisent vers un point culminant. Pour cela, on peut utiliser un but générique pour tous les PJ (par exemple, la quête de la pierre philosophale pour Démiurges, ou traquer les pécheurs dans DitV…). On peut également utiliser les buts personnels des PJ, mais pour cela, les PJ doivent être créés avant de pouvoir écrire le scénario. Quoi qu’il en soit, je pense que la création d’obstacles doit être adaptée aux PJ, du moins à leur background.

Pour Harry Potter JDR, je pense que la plupart des obstacles seront des PNJ antagonistes ou des situations X ou Y liées principalement à la scolarité des PJ et à leurs traits. En arrière plan, j’imagine une intrigue en filigrane et sans doute initiée par un antagoniste dangereux, genre un mage noir qui voudrait obtenir un truc pas possible dans le château de Poudlard.

J’imagine que les portes que l’on peut créer sont infinies de par leur diversité et dépendent fortement du type de jeu créé.
Je nomme les obstacles portes, car ils ont un lien intime avec les indices que je nomme clefs.

Bon, je ne sais pas si j’ai fini pour les portes, mais prochainement, je vous exposerai ma réflexion sur les clefs.

Avant de poursuivre, je veux préciser une chose. Généralement, lorsqu’on crée une histoire, la fin est réellement importante. Mais j’ai souvent eu des scrupules à déterminer la fin exacte que devaient vivre les personnages, c’est pourquoi, j’ai rapidement proposé plusieurs fins possibles dans mes scénarios. Mais je crois aujourd’hui qu’il est plus intéressant de laisser les joueurs mener leur barque à partir d’un certain moment, lâcher la bride, quand les enjeux sont clairs. Que chacun prenne position, jouez vos PNJ, et laissez l’issue arriver d’elle-même. De la façon dont je l’ai timidement expérimenté à Harry Potter, j’ai bien senti que la « scène finale » du scénario était chargée de potentiel. Tant que l’issue ne convient pas à l’un des joueurs, on peut relancer les enjeux en prenant bien soin de compliquer l’affaire à chaque fois. Quoi qu’il en soit, il est important de ne pas prévoir la façon dont les PJ vont franchir une porte, ni s’ils vont la franchir. L’intérêt est le conflit et non la récompense. Vous remarquerez d’ailleurs que si un jeu comme DitV est peu versé dans les malus, il n’est pas fréquent d’obtenir des retombées d’expérience qui font « progresser » le personnage. On s’intéresse plus à ce qui ressort du conflit et comment ça a marqué ou influencé le personnage…

 

Voici un ancien article que j’ai écrit sur le forum Silentdrift que j’ai décidé de retranscrire dans le but d’inaugurer cette nouvelle rubrique de théorie rôliste.

Je cherche ici à développer une forme d’écriture scénaristique et de maîtrise qui évite les deux méthodes nommées « l’illusionnisme » et le « participationnisme » décrites par M. Jopseph Young dans sa théorie 101. Il reste « l’esprit pionnier » et le « jeu de basse ». Ce que je tente de faire, c’est défricher le terrain afin d’en tirer ce qui m’apparaît comme étant le plus intéressant.

Dans mon thread concernant un compte rendu de partie du JDR Harry Potter favorisant le narrativisme, j’ai expérimenté un petit mélange afin de coller au plus près aux livres de Rowling : créer un mélange de scènes banales saupoudrées d’une intrigue sous-jacente plus héroà¯que.

Il faut dire que cela me conviendrait parfaitement, car même si d’un point de vue de ma petite philosophie personnelle le narrativisme m’attire et me convient plus que tout, ma passion pour l’écriture scénaristique tend à en prendre un coup. Mais je reconnais volontiers que le JDR se prête très mal à toute forme de dirigisme. Pour contrer cela, le participationnisme propose aux joueurs une certaine liberté dans un champ donné, sachant que l’on oeuvre dans l’ensemble pour faire avancer le scénario. L’esprit pionnier propose des « clefs » placées en des endroits précis, si les joueurs passent à côté, à priori, c’est qu’ils n’ont pas été assez curieux.
Ces deux formes de maîtrise sont parfaites pour galvaniser un esprit de compétition car elles impliquent une notion relative de réussite ou d’échec (Note de l’auteur : aujourd’hui j’émets des réserve par rapport à ces propos). Ces valeurs ne m’intéressent pas. Pour cela, le jeu de basse me convient beaucoup plus. J’essaierai donc de voir comment il pourrait s’adapter aux différents genres d’histoires.

Je ne saurais être exhaustif, je vous serai donc gré de me corriger et de m’éclairer sans hésitation au sujet de boulots qui auraient pu être fait à ce sujet. D’autant que mon expérience étant balbutiante, cette recherche vise à élaborer d’éventuels schémas pour, si ce n’est élargir, préciser des façons de préparer et de jouer des histoires sur ce mode.

Tout d’abord parlons de but. En dramaturgie, il est acquis que ce qui rend une histoire efficace, c’est :
1- que le protagoniste ait un but
2- qu’il rencontre des obstacles sur son chemin

Pour que le récit se construise il faut :
1- une amorce (genèse du but) plus efficace si l’on la place dès le début du récit
2- un développement (rencontre et conflit avec les obstacles)
3- un dénouement (atteint-il son but ou non ?)

Éléments facultatifs :
– pas de hasard dans l’histoire sauf éventuellement à l’amorce (sinon, risque de deus ou diabolicus ex machina = perte de crédibilité)
– possibilité de créer un double dénouement (oui puis non ou non puis oui en guise de dénouement
– l’ironie dramatique (quand le joueur sait un danger que le personnage ignore)
– la surenchère dramatique (compte à rebours, pressions diverses…)
– le coup de théâtre (nécessite de planter à l’avance discrètement un justificatif)
– l’exploitation du décor (si un fusil est accroché au mur, il doit servir le récit)

Ces listes sont les schémas de dramaturgie classique, utilisée dans l’écriture romanesque et filmique (en BD aussi). Certaines choses seront peut être à adapter…

Les personnages se définissent plus facilement par leur but, qu’ils soient principaux ou secondaires (PJ ou PNJ). Ainsi, celui dont le but est opposé à celui du protagoniste devient antagoniste.

Les obstacles peuvent être internes ou externes. Pour cela, plongez dans les traits ou le background du PJ. Il n’y a rien de plus fastidieux qu’une histoire où le personnage n’est pas lié à ce qui lui arrive (sauf peut être dans le burlesque ou le survival). Pour qu’un but soit justifié, il faut qu’il vienne du personnage.
(Vous pouvez d’ailleurs créer un obstacle en mélangeant les causes internes et externes, ce qui est souvent le plus intéressant, ex : ce mec me rappelle mon prof de math, si il continue à me parler comme ça, je vais m’énerver et lui en coller une…).
En psycho, une théorie très intéressante que l’on doit aux messieurs Beauvois et Joules se nomme « escalade d’engagement ». Elle explique qu’un homme tend à persister dans une voie, d’autant plus que le premier pas qui l’y a engagé est gratuit. Si vous payez cher quelqu’un pour faire un job, il aura une bonne raison de le faire mais peu d’engagement personnel. En effet, il prétextera qu’il le fait pour l’argent. Alors que s’il ne sait pas vraiment pourquoi il fait un travail en s’étant engagé dedans de lui-même (ou du moins qu’il en ait l’impression), il cherchera toujours à justifier son acte. C’est pareil en dramaturgie, laissez donc vos joueurs choisir leur kicker.

Les Kickers.

Je propose même d’écrire des scénarios en laissant les amorces libres et en les remplissant une fois que les joueurs ont créé leurs personnages. Vous pourriez même proposer aux joueurs eux-mêmes de choisir ce que leur personnage veut accomplir. A vous de tisser quelque chose autour de ça.

 

Un petit essai d’illustration pour mon JDR Démiurges.